Un modèle de série chronologique est une équation précisant la façon dont les composantes s’articulent les unes par rapport aux autres pour constituer la série chronologique. Il existe de très nombreux modèles, et parmi eux deux modèles classiques simples : le modèle additif et le modèle multiplicatif, auxquels nous nous limiterons.
Dans les deux modèles présentés,
la longueur des moyennes mobiles doit être impérativement égale à la période
des variations saisonnières.
Nous avons présenté dans le tableau 3.8 les données sous une forme particulière : en lignes, ce sont les années, et en colonnes les trimestres : le terme xt correspondant à la te observation est alors noté xi,j, i donnant l'année (la ligne) et j le trimestre (la colonne).
La relation entre les indices i et j d’une part et l’instant t d’autre part est la suivante :
t = (i-1) p + j
Exemple :
|
j = 1 |
j = 2 |
j = 3 |
j = 4 |
i = 1 |
t = 1 |
t = 2 |
t = 3 |
t = 4 |
i = 2 |
t = 5 |
t = 6 |
t = 7 |
t = 8 |
i = 3 |
t = 9 |
t = 1° |
t = 11 |
t = 12 |
Exemple pour n = 3 et p = 4
Nous utiliserons cette notation très souvent dans la suite du texte.
La série chronologique xt se décompose en une tendance notée ct, des variations saisonnières st de période p (égales à s1, s2, s3, …, sp) et d'une composante accidentelle et.
Le modèle le plus simple est le modèle additif, dans lequel la variation saisonnière s'ajoute simplement à la tendance :
pour
tout t = 1, …, T |
xt
= ct + st + et |
Le modèle additif s'exprime donc en général de la façon suivante :
pour tout i = 1, …, n |
pour tout j = 1, …, p |
xi,j = ci,j + sj + ei,j |
Le terme sj caractérise la variation saisonnière à l’instant j de chaque période i : du trimestre j dans le cas particulier des séries 1 et 2 (p = 4), du mois j dans des données mensuelles (p = 12) etc.… Les moyennes mobiles seront aussi notées mmi,j.
Définition : les termes sj du modèle additif exprimé sous la forme précédente sont appelés coefficients saisonniers du modèle additif.
On peut calculer la différence entre l'observation et la tendance :
pour tout i = 1, …, n |
pour tout j = 1, …, p |
xi,j – ci,j = sj + ei,j |
Pour un même trimestre, la différence entre l'observation et la tendance est donc à peu près constant et égale à sj (on suppose que la composante accidentelle est relativement faible).
Nous avons vu précédemment que les moyennes mobiles de longueur l égale à la période des variations saisonnières sont des approximations de la tendance. On peut donc considérer que la différence entre une observation xi,j et la moyenne mobile mmi,j correspondante est à peu près constante pour j fixé :
pour
tout i = 1, …, n |
pour
tout j = 1, …, p |
xi,j – mmi,j » sj |
Cette propriété est recherchée sur la représentation graphique de la série xt pour déterminer si cette série suit un modèle additif ou non. Elle peut être observée sur la figure 5.8 dans laquelle la tendance est caractérisée par les moyennes mobiles de longueur 4 : les différences entre x3 et mm3, entre x7 et mm7, entre x11 et c11 sont à peu près constantes, de même les différences entre x4 et mm4, x8 et mm8, x12 et mm12 etc.
On peut en déduire les différences xi,j – mmi,j. Les moyennes mobiles donnant une première approximation de la tendance ci,j, les colonnes du tableau des différences contiennent des approximations des coefficients sj.
Exemple :
Les moyennes mobiles et par suite différences xi,j – mmi,j
ne sont pas définies aux premier et deuxième trimestres de la première année,
ni aux troisième et quatrième trimestres de la dernière (tableaux 4.8 et 5.8).
|
1er trimestre |
2e trimestre |
3e trimestre |
4e trimestre |
Année 1 |
|
|
103.39678 |
104.44080 |
Année 2 |
105.14860 |
106.25917 |
107.31233 |
108.46116 |
Année3 |
109.65950 |
110.47448 |
111.27404 |
112.28937 |
Année 4 |
113.42748 |
114.58360 |
115.45379 |
116.22236 |
Année 5 |
117.24943 |
118.38337 |
119.64839 |
120.80691 |
Année 6 |
121.79719 |
122.54573 |
|
|
Tableau 4.8 : moyennes mobiles de longueur 4 de la série 1
1er trimestre |
2e trimestre |
3e trimestre |
4e trimestre |
|
Année 1 |
|
|
5.50932 |
9.71580 |
Année 2 |
-8.94393 |
-6.86050 |
5.45047 |
10.72334 |
Année3 |
-10.05746 |
-5.28258 |
5.28226 |
9.62153 |
Année 4 |
-10.15538 |
-4.93910 |
5.75471 |
10.28534 |
Année 5 |
-11.61263 |
-4.95497 |
5.99271 |
10.33979 |
Année 6 |
-10.67929 |
-5.33023 |
|
|
Tableau 5.8 : différences entre les observations et les
moyennes mobiles
de la série 1
Les différences apparaissant
dans une même colonne sont proches les uns des autres et caractérisent le
modèle additif.
Les différences xi,j – mmi,j sont donc des approximations des coefficients sj. Leur moyenne (ou leur médiane) , pour chaque colonne j, donne une première estimation sj':
|
|
1 |
n |
|
sj' |
= |
––– |
S |
(xi,j – mmi,j) |
|
|
n |
i = 1 |
|
On obtiendra enfin les estimations définitives sj en centrant ces termes sj’:
· on calcule la moyenne des sj’:
|
|
1 |
|
ms' |
= |
––– |
(s1'
+ s2' + … + sp') |
|
|
p |
|
· on centre en posant :
pour tout j =1, …, p |
sj = sj' – ms' |
Exemple : le tableau 5.8 donne les différences entre les observations et les moyennes mobiles. On en déduit les moyennes suivantes :
s1' = -10.2897 |
s2' = -5.4735 |
s3' = 5.5979 |
s4' = 10.1371 |
·
On calcule la moyenne des sj' : ms'
= -0.007039938
·
Les valeurs définitives sont obtenues en posant sj
= sj' – ms':
s1 = -10.2827 |
s2 = -5.4664 |
s3 = 5.6049 |
s4 = 10.1442 |
règle
de calcul des estimations des
coefficients saisonniers du modèle additif |
·
on calcule les différences entre les observations et
les moyennes mobiles ; |
·
on calcule la moyenne ou la médiane sj’
des différences de chaque colonne du tableau ; |
·
on calcule la moyenne ms' de ces valeurs sj'
; |
·
on obtient les estimations sj en centrant
les valeurs sj’ : sj = sj' – ms'. |
Le second modèle que nous étudions ici est le modèle multiplicatif suivant :
pour tout t = 1, …, T |
xt = ct (1 + st) + et |
En présentant les données comme dans le paragraphe précédent, le modèle multiplicatif s'exprime de la façon suivante :
pour tout i = 1, …, n |
pour tout j = 1, …, p |
xi,j = ci,j ( 1 + sj ) + ei,j |
Le terme sj caractérise la variation saisonnière du trimestre j dans le cas particulier des séries 1 et 2, du mois j dans des données mensuelles etc.
On peut calculer la différence entre l'observation et la tendance :
pour tout i = 1, …, n |
pour tout j = 1, …, p |
xi,j – ci,j = ci,j sj + ei,j |
Considérons le cas particulier j = 1 (1er trimestre de l’année i).
pour tout i = 1, …, n |
xi,1 – ci,1 = ci,1 s1 + ei,1 |
La différence xi,1 – ci,1 entre l'observation et la tendance est proportionnelle à la tendance ci,1 : lorsque cette tendance est croissante, la différence augmente, lorsqu'elle est décroissante, il diminue.
Le même raisonnement peut évidemment être tenu pour j fixé quelconque. Les différences permettent ainsi de déterminer si la série chronologique étudiée suit un modèle multiplicatif.
Exemple : on considère la série
chronologique ci-dessous :
|
1er trimestre |
2e trimestre |
3e trimestre |
4e trimestre |
Année
1 |
224.3705 |
253.2811 |
201.2421 |
248.9411 |
Année
2 |
274.3802 |
300.1641 |
248.9038 |
298.4386 |
Année
3 |
331.9657 |
371.4032 |
303.4313 |
365.9029 |
Année
4 |
406.6326 |
437.9967 |
361.5774 |
444.8447 |
Année
5 |
488.4166 |
536.5268 |
435.5698 |
549.3614 |
Année
6 |
598.0016 |
659.2896 |
533.2156 |
669.2675 |
Tableau 6.8 : série chronologique 2
(modèle
multiplicatif , période p = 4)
Figure 7.8 : série 2 et moyennes mobiles de longueur 4
Cette série est soumise à des
variations saisonnières de période 4 ; la tendance, caractérisée par les
moyennes mobiles de longueur 4, est croissante, et la différence entre une
observation xt et la moyenne mobile mmt a tendance à
augmenter pour une même variation saisonnière : l Les différences entre x3
et mm3, entre x7 et mm7, entre x11
et c11 augmentent visiblement, de même que les différences entre x4
et mm4, x8 et mm8, x12 et mm12
etc. (figure 7.8).
Pour quantifier les variations saisonnières, on considère les rapports xi,j / ci,j :
pour
tout i = 1, …, n |
pour
tout j = 1, …, p |
xi,j
/ ci,j = 1 + sj + ei,j / ci,j |
En considérant que les variations accidentelles ei,j sont faibles par rapport à la tendance ci,j et en utilisant l'approximation de la tendance par les moyennes mobiles, on constate donc que les rapports x3 / mm3, x7 / mm7, x11/mm11, … sont à peu près constants et donnent une approximation de 1 + s3, de même les rapports x4 / mm4, x8 / mm8, x12 / mm12 etc. donnent une approximation de 1 + s4 :
|
xi,j |
|
|
pour tout j = 1, …, p |
–––––– |
= |
1 + sj = S j |
|
mmi,j |
|
|
Exemple
: les tableaux 7.8 et 8.8 ci-dessous contiennent les moyennes mobiles de la
série et les rapports xi, j / mmi,j.
1er trimestre |
2e trimestre |
3e trimestre |
4e trimestre |
|
Année 1 |
|
|
238.210 |
250.322 |
Année 2 |
262.140 |
274.284 |
287.670 |
303.773 |
Année3 |
319.494 |
334.743 |
352.509 |
370.167 |
Année 4 |
385.759 |
402.895 |
422.986 |
445.525 |
Année 5 |
467.090 |
489.404 |
516.167 |
545.210 |
Année 6 |
572.761 |
599.955 |
|
|
|
1er trimestre |
2e trimestre |
3e trimestre |
4e trimestre |
Année 1 |
|
|
0.84481 |
0.99449 |
Année 2 |
1.04670 |
1.09435 |
0.86524 |
0.98244 |
Année3 |
1.03904 |
1.10952 |
0.86078 |
0.98848 |
Année 4 |
1.05411 |
1.08712 |
0.85482 |
0.99847 |
Année 5 |
1.04566 |
1.09629 |
0.84385 |
1.00761 |
Année 6 |
1.04407 |
1.09890 |
|
|
Les rapports dans chaque colonne
du tableau 8.8 sont à peu près constants.
Les rapports xi,j / mmi,j sont donc des approximations des termes 1 + sj que l'on appelle coefficients saisonniers dans le cas du modèle multiplicatif.
Définition : les termes Sj = 1 + sj du modèle multiplicatif exprimé sous la forme précédente sont appelés coefficients saisonniers du modèle multiplicatif.
On obtient des premières estimations Sj' des coefficients saisonniers en calculant la moyenne (ou la médiane) des rapports figurant dans chaque colonne. Par analogie avec les coefficients saisonniers sj du modèle additif, dont la moyenne est égale à 0, on cherche des estimations définitives Sj de moyenne 1 :
· on calcule la moyenne :
|
|
1 |
|
mS' |
= |
––– |
(S1' + S2' +
… + Sp') |
|
|
p |
|
·
on
pose :
pour tout j =1,
…, p |
Sj = Sj' / mS' |
Les coefficients saisonniers estimés Sj sont ainsi de somme p :
|
|
1 |
|
S1 + S2 + …
+ Sp |
= |
––– |
( S1’ + S2’
+ … + Sp’ ) |
|
|
mS’ |
|
|
= |
p |
|
ce qui équivaut à une moyenne des sj égale à 0 puisque l'on a Sj = 1 + sj.
Exemple :
· le tableau 8.8 donne les rapports des observations aux moyennes mobiles.
·
on en déduit les moyennes suivantes :
S1' = 1.045913 |
S2' = 1.097236 |
S3' = 0.8539006 |
S4' = 0.9942986 |
·
on calcule la moyennes des Sj' : mS'
= .9978371
·
les valeurs définitives sont obtenues de façon que
les Sj' soient de moyenne 1 :
S1 = 1.04818 |
S2 = 1.099614 |
S3 = 0.8557515 |
S4 = 0.9964539 |
règle de calcul des estimations des
coefficients saisonniers du modèle multiplicatif |
·
on calcule les rapports des observations aux moyennes
mobiles ; |
·
on calcule la moyenne ou la médiane des rapports Sj’
de chaque colonne du tableau ; |
·
on calcule la moyenne mS’ de ces valeurs ; |
·
on obtient les estimations Sj en posant Sj=Sj’
/ mS’. |
Les coefficients saisonniers permettent d'éliminer d'une observation les effets de la variation saisonnière correspondante. On obtient ainsi les valeurs corrigées des variations saisonnières, ou encore les valeurs désaisonnalisées.
L'avantage de cette désaisonnalisation est de permettre la comparaison de deux observations soumises à des variations saisonnières différentes.
définition : on appelle observation corrigée des variations saisonnières la valeur xi,j' obtenue en éliminant l'effet saisonnier sur la valeur xi,j.
modèle additif : |
xi,j' = xi,j
– sj |
modèle multiplicatif : |
xi,j' = xi,j
/ Sj |
Les valeurs corrigées des variations saisonnières (expression souvent abrégée par c.v.s.) caractérisent à la fois la tendance et la variation accidentelle.
Exemple : on donne ci-dessous les quatre dernières observations de la série 2 (année 6) et les valeurs corrigées des variations saisonnières :
|
1er trimestre |
2e trimestre |
3e trimestre |
4e trimestre |
observations : |
598.00160 |
659.28960 |
533.21560 |
669.26750 |
valeur c.v.s. : |
570.51396 |
599.56452 |
623.09629 |
671.64924 |
L'observation du deuxième trimestre est largement supérieure à celle du troisième, mais c'est l'inverse pour les valeurs c.v.s. : la tendance est restée croissante au troisième trimestre.
Supposons que l'observation du premier trimestre de l'année 7 soit égale à 720.15. Pour savoir si la tendance est restée à la hausse, on calcule la valeur désaisonnalisée :
x7,1' = 720.15/1.04818 = 687.04771
et on la compare à la valeur désaisonnalisée du quatrième trimestre de l'année précédente :
x6,4' = 671.649
La valeur c.v.s. x7,1' est supérieur à x6,4'. La tendance est restée à la hausse si la différence est supérieure à la variation accidentelle . Il faudrait donc comparer cette différence à l’écart type des variations accidentelles, calculé sur les données antérieures. Il semble que dans la pratique, cette comparaison ne soit guère effectuée.